Ukraine : le danger de la traite des êtres humains est bien réel

« Dès le début, nous avons pris ce risque en compte », explique Iryna Maievska gestionnaire de programme sur la migration à Caritas Ukraine. Iryna travaille pour Caritas Ukraine depuis 14 ans et vit avec sa famille à Lviv. « Nous informons les personnes exilées des dangers et leur donnons aussi des conseils par téléphone. Nous avons aussi établi une liste de recommandations expliquant les règles de base à suivre. En attendant, nous coordonnons notre travail dans ce domaine avec d’autres organisations et avec des pays comme la Roumanie et l’Allemagne. Lorsque les personnes en exil arrivent en Pologne, elles reçoivent des informations. »

Iryna craint que certaines des femmes et des enfants qui ont fui ne reviennent pas en Ukraine. « Ils ont vécu des événements très traumatisants, et beaucoup de choses ont été détruites. Cela dépendra aussi de la durée de la guerre. Pour le moment, nous survivons au jour le jour. La reconstruction ne pourra commencer que lorsque la guerre sera terminée. Nous devrons alors compter sur notre gouvernement, avec le soutien des organisations de la société civile. »

Selon l’Ukrainienne, il est important que les États membres de l’Union européenne (UE) fassent des efforts pour sensibiliser les personnes exilées aux dangers de la traite d’êtres humains. « On pense souvent qu’il s’agit d’exploitation sexuelle, mais en pratique, le plus grand danger se situe dans le circuit du travail. C’est là que l’inspection du travail doit jouer son rôle. Vous voyez des pratiques d’exploitation par exemple dans les fermes, dans les zones reculées, où les gens sont plus faciles à cacher. »

Le statut de protection temporaire peut certainement aider à empêcher une éventuelle traite des êtres humains, estime Iryna. « Cependant, dans certains États membres, il faut trop de temps pour obtenir ce statut. Ça ne se passe pas bien partout. »

Le réseau Caritas veut promouvoir l’égalité de traitement de tous et toutes les migrant-e-s, pense Iryna. « Les migrants, quel que soit leur statut, doivent bénéficier de droits sociaux et de soins médicaux. Il est plus important que jamais de trouver davantage de moyens de régulariser les personnes. Nous sommes très reconnaissants de la vague de solidarité que nous connaissons, mais cette solidarité devrait s’appliquer à tous ceux qui fuient pour se protéger. »

Iryna est consciente que certaines personnes qui ont fui l’Ukraine sont ressortissant-e-s de pays tiers et n’ont pas la nationalité ukrainienne. Il s’agit par exemple d’étudiant-e-s africain-e-s. « Ces personnes sont aussi dans une position vulnérable », conclut-elle.

Au début du mois d’avril 2022, Caritas Europe a répondu à la consultation organisée par la Commission européenne sur la mise en œuvre de la directive européenne sur la lutte contre la traite d’êtres humains. Dans cette contribution, Caritas Europe a souligné, entre autres, la nécessité de :

– développer une approche axée sur les victimes dans la lutte contre la traite d’êtres humains, pour mieux les protéger
– mettre en place un mécanisme d’assistance adéquat pour soutenir et indemniser les victimes de la traite, y compris celles qui retournent dans des pays tiers
– s’attaquer aux facteurs qui favorisent la traite des êtres humains tels que la pauvreté, le manque d’éducation et d’opportunités, les conditions de travail précaires.
– multiplier les campagnes de sensibilisation transfrontalières à grande échelle
– s’attaquer aux nouvelles formes de traite d’êtres humains, y compris celles en lien avec l’utilisation accrue de nouvelles technologies
– des voies de migration plus sûres et légales pour éviter que les gens ne soient contraints d’entreprendre des voyages dangereux
– la cohérence entre les législations européennes interconnectées

Compte tenu des risques accrus de traite et d’exploitation dans le contexte ukrainien, nous insistons sur la nécessité de mettre en place des campagnes de sensibilisation, des formations, ainsi que des mécanismes d’enregistrement et d’identification adéquats et des politiques de protection. Caritas Europe et ses organisations membres ont rédigé un document destiné à ses employé-e-s et aux bénévoles qui travaillent avec des personnes exilées pour diminuer drastiquement le risque de traite et d’exploitation d’êtres humains.

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