Malnutrition et insécurité : les réfugiées congolaises tentent de survivre en Ouganda

Caritas International Belgique Malnutrition et insécurité : les réfugiées congolaises tentent de survivre en Ouganda

Mapenzi (à gauche) devant son abri. / © Johanna de Tessières - Caritas International

Mapenzi (à gauche) devant son abri. / © Johanna de Tessières - Caritas International

05/09/2023

Mapenzi, réfugiée congolaise en Ouganda, lutte contre la faim. L’aide alimentaire est insuffisante. A ce rythme, combien de temps pourra-t-elle encore allaiter ses jumeaux ? Installée dans un abri sans porte, en bordure du village, elle est en proie à de nombreux dangers.  En Ouganda, des milliers de femmes vivent dans des conditions alarmantes, le ventre serré de faim et d’inquiétude.

Une petite parcelle où construire et potentiellement cultiver des légumes. Un abri composé de terre humide, de quelques branches et d’une bâche en plastique. Une aide alimentaire à rationner. Une survie qui s’agence autour de ces maigres fondations. Après avoir fui l’enfer en République démocratique du Congo (RDC), de nombreuses femmes mènent une vie difficile en tant que réfugiées. Sans revenu ni perspective d’avenir, elles se battent quotidiennement pour s’en sortir.

MAPENZI : « NOUS DEVIONS FUIR TOUS LES JOURS »

Mapenzi signifie « amour ». La jeune femme de 21 ans est arrivée avec sa petite sœur et sa tante en 2023 dans le village de réfugiés de Kyangwali, en Ouganda.  Elles sont originaires de région du Nord-Kivu, en RD Congo, où les conflits sont en recrudescence. La fuite était leur seule option pour survivre. « Là où nous vivions, il n’y a pas de paix. Des personnes armées de machettes venaient souvent la nuit dans notre maison », raconte Mapenzi. « Nous devions fuir tous les jours. »

Ses parents sont morts en RD Congo. Mapenzi a fui le pays enceinte mais a perdu la trace du père de ses enfants pendant leur périple. Opio et Atchena, ses jumeaux, sont nés en mars 2023 mais leur maman peine à se remettre de l’accouchement. Suite à la césarienne, elle est incapable de marcher sur une longue distance.

Mapenzi et sa sœur ont construit un abri de fortune sur le lopin de terre qui leur a été attribué par les autorités ougandaises. Cette petite parcelle contient du maïs mais il ne leur appartient pas. Elles n’ont pas le droit d’y toucher. Elles ne pourront rien planter sur leur parcelle tant que le maïs n’aura pas été récolté. Actuellement sans revenu, les jeunes femmes dépendent entièrement de l’aide du Programme Alimentaire Mondial (PAM)1 : « une fois par mois, nous recevons des haricots, de la farine et de l’huile de cuisson. Vers le milieu du mois, nous n’avons déjà plus rien », témoigne Mapenzi. Depuis juillet 2023, faute de financement suffisant, le PAM est contraint de réduire les rations.

FEMMES EN DANGER

La moitié2 des réfugiés à Kyangwalli (53%) est constituée de femmes. Parmi elles, 13% sont considérées comme des personnes avec des « besoins spécifiques ». Ces dernières doivent être aidées en priorité, du fait de leur vulnérabilité accrue et de leur besoin de protection. Parmi les personnes les plus vulnérables figurent principalement des femmes isolées et des enfants. Une aide spécifique peut également être apportée suite à des agressions et aux conséquences physiques ou psychologiques de celles-ci. L’insécurité alimentaire, menace constante, reste toutefois parmi les plus grands dangers.

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Mapenzi vit à l'extrémité du village, elle est très isolée. / © Johanna de Tessières - Caritas International

« Quand il n’y a plus à manger, je ne peux rien faire », déplore Mapenzi. « Quand ma tante a de la nourriture, elle nous en donne un peu ». Récupérer les maigres colis alimentaires fournis par la communauté internationale nécessite une journée de marche. Mapenzi est trop faible pour marcher longtemps. Ces colis sont donc récupérés grâce à sa tante et à sa sœur. Elles n’ont aucune réserve. Les sœurs passent régulièrement des journées entières sans manger. A ce rythme, combien de temps Mapenzi pourra-t-elle encore allaiter ses jumeaux ? Elle souhaite s’en sortir. Elle ne peut pas cultiver mais avec sa tante et sa sœur, elles pourraient élever des poules.

 

En RD Congo, Mapenzi était sans cesse réveillée par l’intrusion de rebelles armés de machettes. Aujourd’hui, elle vit avec ses jumeaux et sa sœur dans une abri de fortune en bordure du village de réfugiés. Sans porte pour les protéger des intrusions. Dans un pays étranger.

Avec l’aide de ses partenaires locaux, Caritas International s’efforce de fournir le soutien le plus adéquat aux personnes réfugiées. Il s’agit notamment de proposer des possibilités d’emploi et de formation. Cela permet aux personnes réfugiées de conserver leur dignité et de subvenir à leurs besoins ainsi qu’à ceux de leur famille. Les problèmes de protection auxquels elles sont confrontées ont également poussé le réseau Caritas à élaborer des réponses coordonnées pour la protection des personnes à risques telles que les victimes de Violences Sexuelles Basées sur le Genre (VSBG)3.

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Déborah vit avec ses enfants et sa grand-mère. / © Johanna de Tessières - Caritas International

DEBORAH : « ICI IL Y A LA PAIX MAIS LA VIE EST DURE »

Deborah, 19 ans, est maman de jumelles de neuf mois : Birungi et Katusime. Elle a également une fille ainée, Ahumuza, âgée de 3 ans. Comme Mapenzi, Deborah a grandi dans la province du Nord-Kivu. Là-bas, les balles, les machettes et la fuite faisaient partie de son quotidien. Comme Mapenzi, Deborah a perdu une grande partie de sa famille : « ma mère est morte quand j’étais très jeune et mon père est parti à l’armée, je ne l’ai pas connu. J’avais 10 ans quand j’ai dû vivre avec ma grand-mère. Mon mari a été tué au Congo avant que nous n’arrivions ici, alors que j’étais enceinte des jumelles. »

A la recherche d’une vie meilleure loin de la guerre, Deborah et sa grand-mère ont décidé de franchir la frontière ougandaise. Elles ont trouvé refuge à Kyaka II en décembre 2021. « Je me sentais bien parce que je savais que j’aurais la paix ici », déclare Deborah. Mais même en Ouganda, la vie reste difficile.

Deborah vit actuellement dans une « maison » qu’elle a construite de ses mains. Comme Mapenzi, son abri n’a pas de porte, pas de verrou pour la protéger du monde extérieur. L’insécurité rythme son quotidien. Deborah et sa famille bénéficient de l’aide du PAM mais ces dons sont insuffisants : « ma vie est très, très difficile. Il y a des jours où je n’ai rien à manger. Il est difficile de trouver de la nourriture et des vêtements pour les enfants. » Lorsque les rations diminuent, la vie est encore plus précaire pour les personnes les plus vulnérables au sein des communautés réfugiées.

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Deborah cultive quelques légumes mais le terrain est trop petit que subvenir à leurs besoins. / © Johanna de Tessières - Caritas International

DES PISTES POUR LUTTER CONTRE LA FAIM

Deborah cultive quelques légumes sur sa petite parcelle et reçoit une aide alimentaire mensuelle. « Le terrain est trop petit », déplore-t-elle. En quête de solutions pour se nourrir, elle voudrait élever des poules comme elle le faisait en RDC : « mes volailles m’ont bien aidée ». En plus d’augmenter ses rations, les revenus générés lui permettraient d’acheter des médicaments pour ses enfants malades. Monter un petit commerce constitue une autre piste pour générer de l’argent. « J’aimerais vendre de l’huile de cuisine, du savon et des vêtements. J’aime vendre des choses », dit Deborah. « Je peux assumer ce travail car je peux le combiner avec la prise en charge de mes enfants. »

Deborah a d’ailleurs exercé un métier similaire en RDC. Vu que l’argent manquait, elle s’était parallèlement lancée dans l’agriculture et l’élevage de poules. Soutenue par son mari en RD Congo, Deborah doit aujourd’hui se débrouiller seule. « Je ne peux pas travailler dans les champs car mes enfants me dérangent beaucoup », dit-elle. Sa grand-mère l’aide quand elle le peut mais le travail est fatiguant. « J’aimerais que mes enfants aient une vie agréable. Et peut-être que je pourrais moi-même retourner à l’école ».

Depuis juillet 2023, les rations alimentaires ont été réduites par le PAM. Par conséquent, les besoins se font plus pressants. Deborah, Mapenzi et beaucoup d’autres jeunes femmes ont besoin de soutien.

Soulagez leur faim et en donnez-leur accès à de précieux revenus. Quelques animaux d’élevage peuvent leur offrir les deux : du lait nourrissant, des œufs pour manger ainsi que des petits à vendre. Soutenez ces femmes. Faites un don en ligne ou sur le compte BE88 0000 0000 4141 avec la communication ‘4945 CONGO’. 



1

Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) est “la première organisation humanitaire mondiale de lutte contre la faim, fournissant une aide alimentaire dans les situations d’urgence et travaillant avec les communautés pour améliorer la nutrition et renforcer la résilience”. Dans les villages visités, il s’agit des seuls dons alimentaires pour les d’accueil et ceux-ci sont vitaux.

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