La violence en République de Centrafrique est considérée par bon nombre comme un conflit entre chrétiens et musulmans. D’après l’archevêque Dieudonné Nzapalainga – président de la Caritas Centrafrique – les motivations sont essentiellement politiques et tournent autour du contrôle des richesses naturelles du pays. « Les valeurs fondamentales de notre religion, chrétienne ou musulmane, sont des valeurs de tolérance et de droits humains. Un vrai chrétien ou un vrai musulman ne tue pas. Quiconque tue et sème la haine détourne la religion pour des raisons politiques. »
Mgr. Dieudonné est un activiste de la paix depuis de nombreuses années. Son engagement dans les communautés centrafricaines a permis d’éviter beaucoup d’effusion de sang. Avec ses collègues islamiques et évangéliques, il bénéficie d’une reconnaissance internationale pour ses efforts sur le plan du dialogue interreligieux et de la réconciliation. En même temps, il essaie également d’exercer une influence sur les politiques, lesquelles doivent créer un contexte favorisant une coexistence pacifique
Promouvoir la cohabitation et l’autonomie
En République de Centrafrique, les chrétiens et les musulmans vivaient jadis ensemble sans avoir de trop gros problèmes. Traditionnellement, les musulmans sont des bergers et les chrétiens travaillent la terre : ils sont donc complémentaires. Aujourd’hui aussi, il y a de nombreuses histoires de musulmans qui accueillent des chrétiens en fuite, de chrétiens qui ouvrent leurs portes aux familles musulmanes désespérées. Nous devons cultiver cette solidarité et arrêter de mettre l’accent sur ce qui nous divise.
En République de Centrafrique, 8 personnes sur 10 vivent de l’agriculture. Tel est également le cas à Bozoum, au nord-ouest du pays. Ces dernières années, l’insécurité a considérablement compliqué le travail de la terre, avec de mauvaises récoltes pour conséquence. Les pillards ont tué le bétail. L’économie se porte mal. Actuellement, la moitié de la population a besoin d’aide. Beaucoup de familles manquent de nourriture. La FAO (l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) a distribué de la nourriture aux personnes dans le besoin. Grâce à votre aide, nous avons également pu donner un toit, de la nourriture et des soins médicaux aux réfugiés. Mais ce ne sont que des solutions temporaires. Comme nous, ces populations souhaitent prendre leur vie en main et ne plus dépendre de l’aide humanitaire.
Là où règne la pauvreté, le risque de conflit augmente, là où règnent les conflits, la pauvreté augmente. C’est pourquoi, il convient d’aborder les deux problèmes ensemble. C’est ce que nous avons fait l’année dernière avec la Caritas néerlandaise et notre partenaire Caritas local dans la région de Bozoum. Nous souhaitons poursuivre ce travail, d’autant qu’une paix relative est revenue dans le pays après les élections de cette année.
Travailler la terre ensemble
Les groupements de paysans jouent un rôle clé dans notre plan d’action. Les fermiers locaux, les réfugiés ou les personnes retournées dans leur village natal – les voisins – travaillent ensemble : ils veillent à assurer l’approvisionnement en eau de leurs parcelles respectives, ils se mettent d’accord sur ce qu’ils vont cultiver et quand, de manière à ne pas avoir trop de récoltes identiques en même temps. Lors de la composition des groupements, l’origine ou la conviction religieuse n’a aucune importance. Unir les efforts et la concertation permettent d’améliorer les récoltes et les ventes. Ainsi, une confiance de base peut lentement se mettre en place.