Zahra* est originaire d’Irak. Avec ses 4 enfants, elle a traversé la Méditerranée pour rejoindre son mari, Zuher, parti quelques mois plus tôt. Elle raconte.
« Nous étions menacés. Mon mari était policier en Irak. Il recevait des menaces d’Al Qaeda et d’IS. Quelques mois avant notre départ, il a aussi été touché par une bombe. Son dos, ses jambes étaient couvertes de plaies. » Zuher ajoute : « Ils ont finalement tué mon frère et m’ont dit que j’étais le suivant sur la liste. Alors je suis parti. Dans l’espoir de pouvoir faire venir ma famille ensuite, grâce au regroupement familial. ». « Mais nous ne pouvions pas attendre aussi longtemps. J’avais peur qu’ils ne viennent m’enlever les enfants. Nous étions nous aussi menacés. Mieux valait traverser la mer », précise Zara.
Peur de se perdre
Nous sommes alors au mois d’octobre. Il fait froid. La mer n’est pas aussi calme qu’en été. Zara revient sur ce périple : « Nous sommes d’abord parti en direction d’Erbil pour aller vers la Turquie. De là, un passeur nous a emmené vers la côte en bus. Le trajet durait 12h. Nous ne pouvions descendre. J’avais pris des bouteilles d’eau vide pour que les garçons puissent faire leurs besoins. Ma fille portait encore des langes, heureusement. Les enfants dormaient par terre. En descendant du bus, il y avait énormément de monde. C’était le chaos. J’avais peur de perdre les enfants. De là, nous avons encore dû marcher plus d’une heure pour arriver à la mer. D’autres Irakiens m’ont aidé avec les enfants. Une fois arrivés près de l’embarcation – un petit bateau gonflable – les passeurs m’ont dit qu’il n’y avait plus de place pour mon fils. J’ai crié, hurlé pour ne pas qu’ils nous séparent. J’étais hors de moi. Mon fils portait un sac à dos. Ils l’ont attrapé et jeté au loin. Sans le sac, il a pu monter. Nous sommes restés ensemble. Je me souviens que, sur la plage, il y avait énormément de sacs et de vêtements abandonnés. »
Passage en centre collectif
« Une fois sur l’eau, les enfants avaient très peur. Ils ont vomi plusieurs fois. Moi, je n’ai pas arrêté de prier. Le trajet a duré une heure. Une fois en Grèce, j’ai suivi le même trajet que mon mari par la Macédoine et la Serbie ». Pour arriver finalement en Belgique. « Ici, nous sommes passés par plusieurs centres collectifs. La vie y était très difficile, surtout au centre collectif à Bruxelles ». Nous sommes alors fin 2015, en pleine crise de l’accueil : les centres collectifs sont submergés. « Il n’y avait pas d’hygiène au centre. Tout était sale. La nuit, des hommes criaient ». Arrive enfin la réponse à leurs deux demandes d’asile. Ils peuvent rester.
Famille nombreuse vulnérable
La famille est alors redirigée vers le projet transition vers l’autonomie de Caritas International. « Enfin, nous étions dans un logement individuel. Juste nous. En famille ». Les premiers jours en Belgique sont durs mais la famille s’accroche et est très motivée. « Nous apprenons le français et les enfants vont à l’école en néerlandais. Ici, tout est différent. L’école et les devoirs, par exemple. Ici, tout est plus ordonné, moins sale. En Irak, il fait très chaud et tout est toujours couvert de poussière. Ici, il fait froid mais la rue est propre et il y a de la verdure. Et puis, les gens, les belges, sont gentils. Ils nous aident. »