Fête des mères : 3 mamans exilées en Belgique témoignent

Caritas International Belgique Fête des mères : 3 mamans exilées en Belgique témoignent
06/05/2022

Ce dimanche 8 mai 2022, nous fêtons les mamans. Ces mères qui réconfortent, bercent dorlotent enfants… Et qui essaient de les protéger de tous les dangers. Yevheniia, Aisha* et Naguyia ont fui les violences dans leur pays d’origine. Elles racontent ce qu’est d’être mère en exil.

Yevheniia a fui l’Ukraine avec ses 2 filles : « S’il y avait une chance que mes enfants soient en sécurité, il fallait partir »

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Yevheniia, son mari et ses deux filles étaient dans leur maison à Kyiv quand les premières bombes russes sont tombées. Le 24 février 2022 restera gravé dans leur mémoire à jamais. « Nous avions reçu des informations disant que la guerre pouvait éclater » raconte-t-elle « mais notre cerveau ne voulait pas croire que c’était vraiment en train d’arriver. »

« C’était de l’ordre de l’instinct »

Après être resté-e-s une semaine environ dans le sous-sol d’un de leur amis, Yevheniia et ses filles ont pris un train pour la Pologne. « Je n’ai pas réfléchi. C’était de l’ordre de l’instinct : s’il y avait une chance que mes enfants soient en sécurité, il fallait partir. C’était de ma responsabilité, en tant que mère, d’agir. » La séparation avec son mari, le père des filles, fût très difficile : « ça m’a brisé le cœur. »

A partir de la Pologne, Yevheniia, Anna (12 ans) et Yeva (7 ans) ont pris train après train pendant 2 jours, avec d’autres femmes et enfants. « Quand vous avez des enfants, ils deviennent votre priorité absolue. Je ne me souvenais pas de la dernière fois que j’avais eu quelque chose dans l’estomac mais je m’assurais qu’elles aient de quoi boire et manger. »

« Ça changera leur perception de la vie pour toujours »

« Sur le chemin, dans tous les pays par lesquels nous sommes passées, nous avons rencontré des personnes incroyables. Il y avait un soutien énorme, j’étais vraiment impressionnée. À ce moment, ça m’a donné de l’espoir : je me suis dit que tout irait bien. » « Les enfants me demandaient : ‘pourquoi les gens nous aident ?’ et je leur expliquais que c’était parce que c’était des bonnes personnes, qu’ils faisaient ça par empathie. C’était une bonne leçon pour leur apprendre qu’il faut toujours soutenir et aider les autres. Ça changera leur perception de la vie pour toujours. »

Durant tout le trajet, alors qu’elle-même était triste et anxieuse, Yevheniia rassurait ses enfants en essayant de leur donner une autre perspective sur ce qui était en train de se passer. « Vous voyez les blogueurs de voyage que vous adorez ? Si on faisait comme eux ? On voyage, et on pourrait essayer d’en faire un blog ou quelque chose comme ça ! »

Arrivées en Belgique

« À notre arrivée en Belgique, nos ami-e-s nous ont aidé » raconte Yevheniia. « Nous avions vécu à Bruxelles pendant 4 ans, 3 ans auparavant. Nous avons la chance de déjà connaitre des gens, la manière dont le pays fonctionne… Mais je dois dire que c’était un sentiment étranger de revenir dans un contexte si différent. Cette fois, ce n’était pas par choix. » « Les enfants sont retournées dans leur ancienne école seulement quelques jours après notre arrivée » se souvient-elle. « La directrice a accueilli à bras ouverts beaucoup d’enfants ukrainien-ne-s et je suis en train de rassembler une communauté de parents. »

Aujourd’hui, Yevheniia travaille à la ligne téléphonique d’informations qui a été ouverte par Caritas pour les ukrainien-ne-s. « J’adore mon travail. Ça me permet d’être utile et de ne pas trop réfléchir à la situation en Ukraine et d’agir. » « Mes enfants aussi me prennent beaucoup d’énergie et d’espace mental » dit-elle en riant.

« Anna et Yeva ont été très marquées par la guerre. Yeva a peur quand elle entend le bruit d’un avion, et Anna ne veut pas parler de ce qu’il s’est passé. Ce n’est pas toujours facile mais je vois qu’elles sont bien ici. Elles continuent leur vie de petites filles et vivent des moments heureux : un-e camarade de classe qui leur a dessiné un joli dessin, un-e nouveau/elle ami-e… »

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Aisha* : « Je veux offrir à mes filles une meilleure enfance que celle que j’ai eue »

« Je ne connaissais pas la fête des mères », s’exclame Aisha[*]. « En Afrique de l’Ouest, d’où je viens, on ne célèbre pas cela. J’ai entendu parler de la fête des mères pour la première fois lorsque nous étions en Belgique et que mes filles m’apportaient des cadeaux qu’elles avaient faits à l’école. Ça nous a touché : une œuvre d’art pleine de doux sentiments pour moi… »

Aisha a quatre enfants. Aminata [*] a 9 ans et Fanta[*] en a 3. Ensemble, elles ont fui la violence dans leur pays natal il y a 3 ans. Ses 2 autres enfants sont toujours dans leur pays d’origine.

Mère célibataire

« Ce n’est pas facile d’être une mère célibataire », admet Aisha. « Mais c’est déjà beaucoup mieux qu’il y a quelques années. Maintenant je peux profiter de la maternité… ce qui n’a pas toujours été le cas. J’ai eu mon premier enfant quand j’avais 15 ans, je n’étais pas du tout prête. Dans le centre d’accueil en Belgique, nous étions bien entouré-e-s. Une nounou m’a guidée et m’a appris petit à petit à être une mère. »

« En tant que mère j’ai de grands projets pour leur avenir »

Aisha et ses filles se portent bien maintenant. « La chose plus chouette que nous fassions, c’est des vidéos sur Tiktok » dit-elle dans un éclat de rire. « Les filles chantent, et moi je danse. »

« Je veux offrir à mes filles une meilleure enfance que celle que j’ai eue », explique Aisha. « Et bien sûr, en tant que mère, j’ai de grands projets pour leur avenir. J’espère qu’elles deviendront médecins, ou avocates. Mais Aminata a un autre avis sur la question pour l’instant. Elle veut devenir une star, chanter, danser et voyager dans le monde entier… J’espère qu’elle va changer d’avis », dit Aisha en riant.

Naguyia : « Je veux le meilleur pour mes enfants et moi. Peu importe l’endroit. »

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« Je suis arrivée seule en Belgique, enceinte de quelques semaines » raconte Naguyia. Cette mère de 4 enfants est ce qu’on peut appeler une « Super-maman. » « J’ai passé 9 mois enceinte dans un centre d’accueil, après avoir demandé la protection internationale (asile) » raconte-t-elle. Arrivée en 2014, elle est enfin reconnue réfugiée, après 3 demandes d’asile,  en septembre 2021… Le mois où son quatrième enfant voit le jour.

Aujourd’hui, elle vit en Belgique avec 3 de ses enfants : un petit garçon de 7 mois, une fille de 2 ans et demi et un grand garçon de bientôt 7 ans. « Il les fêtera ce 11 mai ! » Son premier fils vit à Djibouti avec son père. Elle met de l’argent de côté pour lui tous les mois et espère le revoir un jour… En attendant, elle l’appelle dès qu’elle peut, malgré la connexion souvent bancale.

« Être maman ça demande beaucoup d’énergie »

« Être maman c’est très fort. Ça demande beaucoup d’énergie. » Chaque matin, Naguyia se réveille, prépare le petit déjeuner, habille les enfants, les conduit à l’école, fait les courses… Un travail à temps plein ! « Quelque fois je tombe de fatigue » souffle-t-elle. Mais son rôle de mère lui tient très à cœur.

« La fête des mères est une belle journée. Dans les pays arabes, comme au Yémen, on la célèbre le 21 mars : les enfants font des gâteaux, offrent des cadeaux, chantent une chanson… » dit-elle le sourire aux lèvres. Et de conclure : « je veux le meilleur pour mes enfants, peu importe l’endroit. »



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