La Déclaration n’est pas un texte du passé, mais doit rester une source d’inspiration dans l’action politique et sociale contemporaine pour promouvoir l’universalité des droits humains.
Prenons, l’article 4 de la Déclaration : « Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude ; l’esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes ». La violation de celui-ci est considéré comme l’une des violations les plus graves des droits fondamentaux. L’interdépendance des droits humains conduit à ce que lorsqu’une personne est victime de traite, quasiment tous ses droits sont simultanément atteints : sa dignité, sa liberté d’aller et venir, son intégrité physique, le droit à des conditions de travail justes et favorables, le droit à un niveau de vie suffisant, le droit à la santé… Malgré cela, la traite des êtres humains persiste sur tous les continents.
Elaboration des programmes humanitaires
Lors d’une conférence organisée fin novembre dernier – qui fait partie d’une projet européen visant à renforcer la coopération multidisciplinaire pour garantir un mécanisme de référence effectif, une assistance et une protection des droits des victimes de traite des êtres humains – Caritas a invité différentes associations provenant de multiples pays. Cette rencontre a permis de souligner l’importance de mieux prendre en compte la question de la traite des êtres humains dans l’aide humanitaire : un champ à explorer d’urgence.
Pour Sébastien Dechamps, coordinateur des urgences chez Caritas International : « De nombreuses crises humanitaires créent des conditions propices au développement ou à l’apparition de réseaux de traite de personnes. C’est en particulier le cas des crises qui causent d’importants déplacements de population. C’est certainement le cas, par exemple, de la crise syrienne : des milliers de personnes, y compris des enfants, ont littéralement disparu lors de leur exode, et sont devenus victimes de réseaux de trafiquants. Cette question pourrait être davantage prise en compte dans l’élaboration de nos programmes humanitaires, en termes de prévention et de protection. »
Changement de paradigme dans la coopération au développement
Alors que nous fêtons le 70e anniversaire de la Déclaration Universelle des droits de l’Homme, et à la veille du 30e anniversaire de la Convention Internationale des droits de l’enfant qui sera célébré en 2019, nous devons utiliser une approche fondée sur les droits humains.
Cette approche constitue désormais un cadre majeur dans lequel s’inscrivent les activités des Nations Unies. Les Objectifs de développement durable (ODD 2015-2030) l’ont prolongé en donnant toute leur place aux droits humains dans le cadre conceptuel du développement. Les pouvoirs publics sont invités à en faire un usage général et systématique.
Cette approche s’est présentée à l’origine comme une réponse aux échecs du développement des années 1980, davantage axé sur la réduction technique de la pauvreté que sur l’amélioration des droits et libertés des populations marginalisées. Elle a conduit à un changement de paradigme dans la coopération au développement : l’approche du développement initialement fondée sur les besoins des populations des pays les moins avancés a cédé la place à une approche fondée sur les droits humains.
Restaurer le primat de la personne humaine
De ce point de vue, les personnes ne sont plus seulement l’objet d’une aide programmée en amont par des instances décisionnaires mais sont considérées comme des acteurs à part entière du développement. L’action publique n’est plus conçue en termes de compensations ou d’assistanat, mais au regard de la mise en œuvre des droits fondamentaux. La pleine effectivité de ceux-ci repose sur la disponibilité, l’acceptabilité, l’accessibilité et l’adaptabilité du droit considéré. L’approche basée sur les droits humains s’applique aussi depuis quelques années à des questions relatives à la gestion des flux migratoires, la sécurité ou les politiques pénales.
Il s’agit de restaurer le primat de la personne humaine et de réaffirmer la juste place des droits humains dans l’action publique : l’État doit non seulement respecter les droits humains consacrés dans les conventions internationales qu’il a ratifiées, mais il doit également rendre des comptes à l’égard de leur mise en œuvre[1]. Les droits humains ne sont plus situés en périphérie de l’action publique mais doivent être inscrits au cœur de cette dernière.