L’histoire d’Evgeni
Evgéni est arrivé en Belgique en septembre 2014. Suite au conflit militaire en Ukraine, il a introduit une demande d’asile en Belgique, avec comme projet…
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Caritas International en Belgique
Le monastère de Svyatohirsk épouse les lignes du paysage accidenté de cette vallée du Donbass. Ses dômes dorés ont pour seul rival l’impressionnante statue d’Artens ; le fondateur d’une république autonome fondée à la chute du tsar avant d’intègrer ensuite l’Union soviétique. A ses pieds, s’écoule la rivière Severskyi Donets. Sur ses berges nous rencontrons Valentina qui, comme 400 autres déplacés, a trouvé protection chez les moines orthodoxes.
Elle y est arrivée en août, accompagnée de ses deux filles et de sa petite-fille. Les moines ne demandent rien d’autres aux personnes qu’ils abritent que quelques heures de leur temps. Si bien que la vie de Valentina est invariablement rythmée par le lever à 6h, les corvées, en cuisine et à la laverie, ainsi que les services religieux que la bienveillance monastique implique. Ses mains portent les stigmates des ‘ tonnes de pommes de terre et de betteraves pelées’.
Elle a fui la tristement célèbre ville de Gorlovka, peu après que les bombardements aient fait voler les fenêtres de sa maison en éclats. Son intention était de trouver une place dans l’un des camps de vacances, aujourd’hui dédiés à l’accueil des déplacés, dont cette région touristique regorge. Mais ceux-ci pris d’assaut, elle et ses filles ont dû se rabattre sur le monastère qui accueille gratuitement les déplacés.
L’austérité de cette nouvelle vie et l’absence d’alternatives pèsent lourd sur son moral. “Nous n’avons ni les moyens de partir ailleurs, ni les papiers qui nous permettraient de rentrer chez nous et que j’attends depuis maintenant 3 mois. Certaines personnes viennent ici en pèlerinage, 3 ou 4 jours, et puis s’en vont. Nous, ça fait 9 mois… L’envie de rentrer est plus forte que la crainte pour ma propre vie, mais il y a mes enfants et petits-enfants. Si mon père, qui s’est battu à Stalingrad sous la bannière soviétique nous voyait, il se retournerait dans sa tombe…”
L’isolement pèse ici aussi lourd que l’exil, et sans emplois à proximité, même les hommes dans la force de l’âge peinent à trouver le moyen d’agrémenter leur quotidien. Valentina survit avec sa maigre pension de 1100 uah et une aide mensuelle des autorités de 800 uah : “À quoi bon travailler toute sa vie pour une telle misère… Si l’on m’avait dit, que je me retrouverais balayeuse de rue à 69 ans pour boucler les fins de mois…”
Il y a peu, Valentina a obtenu de Caritas une bourse d’une valeur équivalente à 300 USD. Elle l’a consacrée à l’achat de vêtements chauds pour sa petite-fille, non sans en mettre une partie de côté en vue de son billet de retour et du remplacement des fenêtres de sa maison, qu’elle rêve tant de regagner. Elle n’a jamais été endettée, “et ce n’est pas maintenant que ça va commencer’”. Alors que nous la saluons, Denis de l’équipe mobile de Caritas Dniepropetrovsk évoque son premier passage dans cette région, dont la beauté dénote avec la détresse, imperceptible à première vue mais bien réelle, de Valentina et de ses compagnons d’infortune. “C’était en 2007, avec un ami. La vallée était sous la neige. Je me suis promis de revenir, mais j’étais loin d’imaginer que ce serait pour venir distribuer de l’aide humanitaire aux habitants de la région…”