Visites domiciliaires : Adelina et sa fille vivent dans la peur

Caritas International Belgique Visites domiciliaires : Adelina et sa fille vivent dans la peur

Isabel Corthier

Isabel Corthier

30/01/2018

« Je ne peux qu’attendre une nouvelle décision quant à ma régularisation médicale. Entre temps, j’ai peur », explique Adelina V.*, albanaise, atteinte d’un cancer de l’intestin. Elle et sa fille font partie des personnes sans droit de séjour, vivant dans la peur depuis l’annonce du projet de loi sur les visites domiciliaires.

Discuté aujourd’hui en Commission de l’Intérieur de la Chambre, ce projet de loi permettra à la police d’entrer au domicile de personnes sans permis de séjour et limite ainsi les droits constitutionnels de personnes vulnérables, comme pour la famille d’Adelina V.

La police tambourine à sa porte

Fin 2015, la famille demande l’asile, qui lui sera refusé tout comme une demande de régularisation pour raisons médicales. Pas de droit de séjour  donc. La famille fait un recours et reçoit alors l’autorisation – pour raisons médicales – de rester dans un logement de Caritas.

La semaine passée, c’est en sursaut qu’Adelina V. est réveillée par la police tambourinant à sa porte dès 6 heures du matin. Elle récupère d’un cancer de l’intestin et habite avec sa fille, âgée de 19 ans. « Nous n’avons pas ouvert et espérions qu’ils repartent vite. Mais la police est restée devant chez nous jusqu’à 13h. Nous sommes désespérées. Je ne comprends pas pourquoi nous sommes traitées ainsi. » Avec la nouvelle loi proposée, munie de l’autorisation d’un juge d’instruction, la police serait entrée de force, aurait pu fouiller l’habitation et les emmener, direction le poste de police et – vraisemblablement ensuite – un centre fermé.

À de lourds problèmes médicaux s’ajoutent du stress

La situation de la semaine passée leur rappelle aussi de très mauvais souvenirs. L’été dernier, certains membres de cette famille ont déjà été arrêtés et détenus en centre fermé. Au vu de ses problèmes médicaux, Joseph*, le mari, a été relâché un jour après son enfermement. Leur fils, par contre, a été contraint de rester en centre fermé et a été renvoyé en Albanie. Seul. Sa mère, son père et sa sœur sont restés en Belgique.

Après cette épreuve, tant Adelina que Joseph ont dû être emmenés à l’hôpital. « Les docteurs ont découvert trois nouvelles tumeurs alors que j’avais été déclarée guérie en mai », raconte Adelina. Ce nouveau diagnostic et le départ forcé de leur fils causent un stress énorme à cette famille. Pour Joseph, c’en est trop : il ne tient pas le coup. Il décèdera quelques semaines plus tard des suites d’une nouvelle crise cardiaque. Il avait 50 ans.

Aux côtés des plus vulnérables

Trois semaines après le décès de son mari, Adelina sera opérée et ses trois tumeurs seront retirées. Aujourd’hui, elle récupère petit à petit. Mais elle craint toujours pour sa vie : « En Albanie, les soins médicaux sont insuffisants et extrêmement coûteux. J’espère pouvoir terminer ces soins en Belgique. Mes enfants ont déjà perdu leur père. Je veux leur épargner le décès de leur mère. »

Les équipes de Caritas continuent de soutenir les plus vulnérables comme Adelina V. Nous demandons par conséquent que le projet de loi ne soit pas accepté dans sa formulation actuelle. Un tel projet de loi va au-delà de ce qui est raisonnable pour une politique migratoire digne de ce nom.



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Afin de garantir l’anonymat des personnes concernées, les noms ont été changés.

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